Rilke

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Envole-toi Octobre



Envole-toi Octobre

Virginie Troussier

Editions Myriapode
jeudi 16 octobre 2014

21 € - 300 pages
Le livre
"Après Septembre, nous attendons toujours une fin, en observant précisément les oscillations de notre cœur. Nous regardons les oiseaux qui volent si bas, dévorer ce qu’ils peuvent comme si la plus grande des guerres leur pendait au cou, ou comme si, au contraire, il était urgent de vivre, le plus délicieux, le plus vite possible avant de fuir ailleurs. C’est bâtard et troublant d’être né en automne. Entre le soleil et la pluie, souffrir et se réjouir de la fragilité du temps, ne pas réussir à compter sur ses doigts les heures qui séparent marée haute de marée basse, tenir au monde par un scotch usé. On peut abriter une saison sous son col, sous sa peau, ses ongles, son oreiller, comme une dent par la fenêtre de l’enfance. On peut avoir quelques pas d’avance sur la saison qui vient et cerner la forme que prend le désir, avant d’aimer à s’en sucer la moelle, puis hurler, à en rougir. Tout peut si vite devenir  pimenté. Car, de ce gris ambiant, advient toujours, d’un ciel ouvert comme une orange, un éclairage nouveau et vaudou. L’automne sème des grenades entre les dents et nous les dégoupillons avec la bouche".

Envole-toi Octobre est le récit d’une héroïne dont la mélancolie cache une indécente adoration  pour la vie. Que doit-on faire couler dans nos veines pour que cela circule ? Il faudrait peut-être, avant tout, réussir à sculpter son être avec des tenailles, sentir ce qui précisément en nous se cabre, et nous rend vulnérables à la capture. C’est l’histoire de ce roman, qui, comme une valse précise, aiguise, découpe, désosse, isole les muscles, élague les nerfs et cisaille tout le reste. 

Note de l'éditeur
Envole-toi Octobre est le récit d’une initiation, de la découverte merveilleuse et douloureuse du monde après l’adolescence, des barrières auxquelles on se heurte. Il existe plusieurs manières de les contourner ou de les franchir. La révolte, la solitude, la mélancolie, le refus du monde et de soi emprisonnent la narratrice dans toute la première partie du livre. Le ton change dans la seconde, l’atmosphère s’éclaircit avec la découverte que l’amour est possible. Loin des confessions cyniques et complaisantes à la mode, le livre rappelle que « l’amour fou » des surréalistes est toujours d’actualité et sans doute une salve de résistance à l’oppression que nous fait subir quotidiennement la société contemporaine.
Les repères temporels et spatiaux de l’histoire, de même que les relations entre les divers événements du livre, vont s’estomper volontairement. Ils s’effacent avec respect devant les digressions et les éclats de poésie. Le langage singulier et les images peu communes, qui accompagnent les soliloques intérieurs des personnages, donnent de la vivacité et de l’insolence aux considérations de Virginie Troussier. La narration n’est pour l'auteur qu'un prétexte pour se livrer à un travail d'introspection. Ce roman initiatique se questionne sur la voix, la voie, la foi, la mort, l’amour et l’art, ultime rachat sur l’humaine condition.

C’est ainsi que le livre ausculte des corps pleins d’électrodes comme on écoute murmurer les coquillages, jusqu’à tomber dans la folie.  Mais la folie n’est rien, un simple écart, un jeu, une question d’intensité. Sismographe des émotions, Virginie Troussier retranscrit sur le papier, à fleur de peau, les vibrations du souffle, les battements des cœurs. Un monde se tisse, se compose et se décompose, tendant inéluctablement vers cette ultime ponctuation, le point final, un grain de beauté.

Quelques Critiques

Par l'écrivain et l'éditeur Marc Villemain
Passé l'expérience (toujours très singulière, parfois éprouvante) de la première publication, Virginie Troussier a, de toute évidence, beaucoup travaillé. On le constate dès les quelques pages d'ouverture, relues deux fois à la suite tant elles ont, et puissamment, réussi à m'arracher à la terrasse de bar où je me trouvais à les lire, et à me propulser aux côtés de Suzanne, la narratrice, au sommet de ces montagnes dont on sait par ailleurs qu'elles sont une des plus fortes passions de l'auteure (monitrice de ski dans le civil en plus d'être critique littéraire). J'ai su, donc, dès ces premières pages, que ce que j'allais lire là ne s'était pas autorisé la moindre concession, et que Troussier était bien décidée à nous écorcher.

(...)

Tout aussi "symptomatique" me semble être la beauté profonde (et, ici, pleine de tendresse) des pages consacrées au père, et plus encore au grand-père - à ce qui vieillit, en somme. Suzanne voit en ces hommes durs, exigeants, farouchement individualistes, l'exemple à suivre. C'est parce qu'on est dur et exigeant envers soi-même, c'est parce qu'on ne se plaint pas, jamais, de rien, parce qu'on a conscience qu'il faut "brûler pour briller", parce qu'il faut accepter que l'amour soit "une lutte dans la boue et l'or", que l'on vivra, que l'on saura vivre, que l'on méritera du mieux que l'on peut de la vie et de ses trésors. Alors Suzanne aimera tout de la vie, mais à la condition de pouvoir y mettre le feu - ce qui, peut-être, explique ce goût de cendres qu'elle ne parvient jamais à recracher tout à fait.



Par Cécile Pellerin, chroniqueuse pour Actualitté

Inédit et touchant, c'est un récit empreint d'une sincérité vulnérable et délicate dont le lecteur se fait d'emblée le protecteur et le complice de page en page, sans répit ni lassitude, interpellé, mis en émoi, grâce notamment à une écriture poétique, intense et sensuelle, ultrasensible où chaque objet, chaque paysage, chaque sentiment, par leur description minutieuse et nuancée, réveillent tous les sens, pénètrent l'âme et le cœur. 

Si ça et là parfois, le lecteur est incommodé, a du mal à suivre l’héroïne dans ses pensées intimes, sa vie intérieure, s'il se sent dépossédé de l'histoire, impuissant, mal à l'aise avec Suzanne et sa sincérité absolue, intimidé même par son esprit, sa précision d'analyse, il lui reste pourtant fidèle jusqu'aux dernières pages, veut croire à son envol (et au talent de cette jeune écrivain, assurément prometteur) stimulé et séduit par centé écriture très personnelle, poétique et musicale, sensitive, qui le pénètre, tel un parfum ardent et capiteux. 

Par Lucie, du blog les Facéties de Lucie

Le premier roman de Virginie Troussier, "Folle d'Absinthe", je l'avais follement aimé au point de le lire deux fois de suite.
Prune, l'écorchée vive qui remâchait ses souvenirs se serait parfaitement entendue avec Suzanne la narratrice mélancolique de ce 2ème roman de Virginie Troussier.
Par Laurence Biava, sur Unidivers
Envole-toi Octobre est un livre intelligent où l'on croise Spinoza, Artaud et Epictète à la faveur de quelques digressions artistiques et d'un foisonnement d'âmes humaines. Avec eux, Suzanne hurle, se brise, aspire la vie à pleins poumons. Mais aussi s'abandonne à l'amour fou jusqu'à se perdre elle-même. Le lecteur, lui, ne la lâche jamais...

Roman passionné de beauté et de souffrance. Parce qu’il somme de se souvenir du passé, d’honorer la mémoire de ses pairs, des anciens. On soulignera la réussite des pages consacrées à la mémoire intrusive, presque obsessionnelles.
A la matinale de la radio Le Mouv'