Rilke

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vendredi 21 novembre 2014

Une chronique de Séverine Laus-Toni pour Envole-toi Octobre


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Après Septembre, nous attendons toujours une fin, en observant précisément les oscillations de notre cœur. Nous regardons les oiseaux qui volent si bas, dévorer ce qu’ils peuvent comme si la plus grande des guerres leur pendait au cou, ou comme si, au contraire, il était urgent de vivre, le plus délicieux, le plus vite possible avant de fuir ailleurs. C’est bâtard et troublant d’être né en automne. Entre le soleil et la pluie, souffrir et se réjouir de la fragilité du temps, ne pas réussir à compter sur ses doigts les heures qui séparent marée haute de marée basse, tenir au monde par un scotch usé. On peut abriter une saison sous son col, sous sa peau, ses ongles, son oreiller, comme une dent par la fenêtre de l’enfance. On peut avoir quelques pas d’avance sur la saison qui vient et cerner la forme que prend le désir, avant d’aimer à s’en sucer la moelle, puis hurler, à en rougir. Tout peut si vite devenir pimenté. Car, de ce gris ambiant, advient toujours, d’un ciel ouvert comme une orange, un éclairage nouveau et vaudou. L’automne sème des grenades entre les dents et nous les dégoupillons avec la bouche.
Envole-toi Octobre est le récit d'une héroïne dont la mélancolie cache une indécente adoration pour la vie. Que doit-on faire couler dans nos veines pour que cela circule? 
J'ai commencé la lecture de ce livre par une sublime dédicace, j'étais donc fortement émue avant même d'avoir lu les premières lignes du roman...
Entre nous, à sa lecture (de la dédicace), j'étais presque sûre que je n'allais pas être déçue, et de fait, la dédicace se révèle être dans la même veine touchante, émotive et vivante que le roman.

Un roman au très beau (et symbolique) titre, plein de folie, de rage et de difficulté de vivre, un roman avec ses petites maladresses et tendresses, qui fait valdinguer dans tous les sens et se cogner contre les murs de la vie comme Suzanne, l'héroïne, que l'on a envie d'aimer, d'écouter, accompagner.  Parce que Suzanne c'est un peu nous... du moins y retrouvais-je un peu de moi, parfois.
Alors je lisais, posais, notais, respirais, reprenais... je voyais une jeune femme, un peu border-line, un peu inadaptée à la dureté de la société/des relations actuelle(s), confrontée aux questions, aux doutes, aux absences, aux envies, aux colères, à la solitude et aux manques que l'on traverse...
Une jeune femme débordante d'envie de vivre au présent, tout en respectant le passé et analysant le sien, qui cherche en elle son 
renouveau, en montagne, auprès de ses parents/amis, à l'hôpital, ou enfermée dans son appartement parisien... sans jérémiades, mais avec frénésie et émotion, et tant de phrases qui font mouche.
Envole-toi Octobre est comme un champ d'herbes folles (où l'on peut se perdre), traversé de tempêtes ou innondé de soleil, plein de la mélancolie et de la rage de vivre qui nous animent alternativement.
Une quête à vif, de soi, d'amour, des autres... Une recherche, 
faite d'accidents de parcours, d'un chemin parfois injustement encombré qui déroute... la vie en somme... hyper-sensiblement décrite par la plume embrasée de Virginie Troussier.

"La vie ne cesse pas. Ne plus vouloir - c'est à dire ne plus désirer, ne plus aimer, ne plus s'efforcer, ne plus refuser, en fin de compte ça ne sert ) rien. Pour chaque racine de la volonté extirpée, d'autres surgissent ou révèlent une présence que nos préoccupations passées nous empêchaient de voir."
Lecture des premières lignes d'Envole-toi Octobre par Virginie Troussier:
L'auteur(e) >> Virginie Troussier est née en 1985. Elle signe ici son deuxième roman après Folle d’absinthe paru en 2012.